Il s'agit d'une question passionnante et cruciale, liée à la rénovation énergétique des copropriétés en réponse au réchauffement climatique, ainsi qu'à la montée en popularité du vélo dans les grandes métropoles post-COVID.
Dans le contexte des immeubles collectifs d'habitation, il est essentiel de distinguer les immeubles en construction et ceux déjà érigés avant 2011.
Cette problématique attire l'attention depuis au moins les années 2000, notamment depuis le décret de solidarité et de renouvellement urbain du 13 décembre 2000, qui a marqué le début des réflexions sur le stationnement des vélos dans les immeubles d'habitation. Il était déjà devenu évident à l’époque que prévoir des espaces dédiés pour les vélos dès la phase de construction était essentiel.
Au fil du temps, des dispositions ont été progressivement introduites dans les plans locaux d'urbanisme, anciennement appelés POS, permettant aux autorités publiques d'exiger la construction d'emplacements pour vélos, mais cela restait facultatif. La véritable avancée s'est produite avec la loi Grenelle 2 de l'environnement, également connue sous le nom de la loi d'engagement national pour l'environnement. Elle a rendu obligatoire la présence de locaux à vélo dans les plans locaux d'urbanisme et dans les nouvelles constructions.
D'autres textes législatifs ont suivi, tels que la loi Alur de 2014, la loi ELAN de 2019, la loi pour les mobilités fin 2019, et plus récemment, un décret publié en juin 2022. Tous ces textes ont considérablement réglementé la construction et la planification d'espaces pour vélos dans les bâtiments neufs, allant jusqu'à imposer des normes strictes, notamment en ce qui concerne les dimensions, la sécurité contre le vol, et autres aspects.
Cependant, la situation diffère pour les bâtiments anciens, c'est -à -dire construit avant 2011. La rétroactivité du droit rend difficile d'imposer de nouvelles règles aux propriétaires existants. Le législateur a donc adopté une approche pragmatique. Après la loi Alur, il a encouragé les copropriétaires d'immeubles anciens à se poser la question annuellement en assemblée générale de la création d'un espace de stationnement pour les vélos, après avoir obtenu des devis. Depuis le 1er janvier 2017, ces copropriétés doivent se pencher sur cette question.
Plus récemment, une mesure intéressante est apparue. Elle impose que la rénovation d'un parking comportant plus de 10 places de stationnement de véhicules s'accompagne de la création d'un espace de stationnement pour les vélos, à condition qu'un tel espace n'existe pas déjà.
Ainsi, depuis 2011, une distinction nette s'est établie :
Sur ce dernier point effectivement, il faut qu’il y ait des emplacements libres pour les vélos et que ces derniers soient suffisamment sécurisés et séparés des places automobiles pour ne pas mettre en danger les cyclistes. C’est certainement pour cette raison que la création de places vélo n’est exigée que lors de grands travaux.
C’est là que joue le décret du 25 juin 2022 qui fixe vraiment des normes techniques liées à la sécurité des cyclistes. Les directives majeures de cette mesure visent à prévenir tout problème de circulation entre les véhicules automobiles et les vélos. En outre, ce texte envisage également la possibilité de réaliser ces aménagements sur les places de stationnement automobile existantes. Il existe quelques dérogations concernant ces aménagements qui s'appliquent par exemple si le parking n’est pas directement accessible depuis la rue etc.
C'est simplement une question de tolérance. Depuis 1965, les principes fondamentaux du droit de la copropriété n'ont guère évolué, et les droits des copropriétaires sur les parties communes demeurent inchangés. L'article 9 de la loi stipule que les copropriétaires peuvent user et jouir librement des parties communes, ce qui signifie que nous, en tant que copropriétaires, possédons ces parties communes.
Cependant, comme le dit l'adage : ” Ma liberté s'arrête là où commence celle d'autrui”. En d'autres termes, lorsque j'utilise et jouis des parties communes, je ne peux le faire qu'en respectant les droits des autres et sans porter atteinte à la destination de l'immeuble, tout en observant les stipulations du règlement de copropriété.
Ainsi, si demain j'ai l'envie de stationner mon vélo dans les parties communes sans autorisation, en le laissant là jour et nuit, on pourrait considérer que je porte atteinte aux droits des autres copropriétaires, ce qui pourrait entraîner la fin de mon stationnement. Je pourrais même être contraint de retirer mon vélo sous astreinte.
Ainsi, pour répondre à votre question, si j'ai soudainement envie de garer mon vélo dans les parties communes et que je le retire le soir même, cela ne posera probablement pas de problème. Toutefois, si je commence à le faire de manière régulière, au même endroit, sans consulter préalablement l'assemblée générale, alors se posera une double question.
Je vous recommande de lire le règlement de copropriété, qui renferme de nombreuses règles, notamment sur les modalités d'usage et de jouissance des parties communes. Vous constaterez souvent une restriction majeure concernant l’encombrement des parties communes.
Donc, bien que l'on puisse utiliser les parties communes pour stationner son vélo de manière ponctuelle, la solution la plus simple reste de demander une autorisation en assemblée générale. J’alerte juste sur le risque que cette tolérance évolue vers une appropriation des parties communes, avec des marquages au sol, des modifications structurelles, etc. Dans ce cas, même chose il faudra obtenir une autorisation formelle de l'assemblée générale pour créer ces aménagements mais cela ne passera pas nécessairement par une modification du règlement de copropriété.
En ce qui concerne l'octroi d'une simple tolérance en assemblée générale, je suis enclin à dire que ce n'est pas nécessaire. Le règlement de copropriété est la référence principale dans la copropriété, souvent considéré comme sa bible. Modifier ce règlement pour une simple tolérance ne semble pas justifié. Cependant, si l'on crée un nouvel équipement ou un nouvel espace collectif dédié aux vélos, alors il sera nécessaire de le modifier pour refléter l'existence de ces équipements. De plus, la question de la répartition des charges se posera. Par conséquent, une modification du règlement de copropriété sera nécessaire chez un notaire pour décrire ce nouvel équipement, et surtout, pour établir une grille de répartition des charges afin de déterminer qui paie quoi.
Pour un espace de ce type, qui n'est pas véritablement un équipement mais plutôt un espace commun, je pense que la répartition des charges se fera dans les charges générales en fonction du prorata des tantièmes de chaque copropriétaire. Cependant, nous observons de plus en plus dans les copropriétés des aménagements plus complexes, incluant des équipements pour la recharge des véhicules et des supports sophistiqués pour le stationnement des vélos. Dans ce cas, la répartition des charges peut se faire en fonction du critère de l'usage objectif par les copropriétaires.
Lorsque l'on crée quelque chose de nouveau dans la copropriété, il est donc nécessaire de modifier le règlement, ne serait-ce que pour le rendre opposable aux personnes qui intégreront la copropriété ultérieurement.
Cela impliquerait de privatiser une partie des espaces communs, ce qui est souvent difficile à réaliser dans le contexte de la copropriété.
Alors qu’en mettant en place un règlement intérieur affiché à l'entrée du local à vélo et envoyé aux copropriétaires suite à son adoption, cela résout en partie le problème des vélos abandonnés, tout en assurant la satisfaction de l'ensemble des copropriétaires.
Il est crucial de faire la distinction entre l'incivilité subie par le copropriétaire cycliste et non-cycliste. En résumé, il y a d'une part celui qui se plaint des vélos qui encombrent et d'autre part celui qui a subi un vol de vélo.
Le copropriétaire non-cycliste qui se plaint des vélos encombrant les parties communes fera part de sa préoccupation au syndic, qui à son tour mettra en demeure le propriétaire du vélo en cause si la plainte est fondée. Dans la plupart des copropriétés, il existe une clause interdisant l'encombrement des parties communes, donc laisser son vélo n'importe où est prohibé. C'est pourquoi il est crucial de solliciter une décision en assemblée générale pour autoriser un emplacement de stationnement spécifique pour les vélos.
Si le copropriétaire cycliste ne respecte pas ces directives, il peut être condamné sous astreinte à retirer le vélo. En copropriété, chacun doit respecter des règles pour vivre ensemble harmonieusement.
En ce qui concerne le copropriétaire cycliste victime de dégradations ou de vol de son vélo, malheureusement, ni le syndic ni la copropriété n'ont la responsabilité de la garde des objets. Le syndic ne joue pas le rôle de policier au sein de la copropriété. Je fais un parallèle avec le vol de voitures, qui se produit souvent dans les parkings privés. Ce n'est pas à la copropriété de résoudre ce genre de situation, bien que les syndics soient toujours là pour apporter leur aide. C'est un problème que le copropriétaire cycliste doit résoudre individuellement en déposant plainte et en suivant la procédure appropriée.
Cependant, si un espace de stationnement sécurisé pour les vélos est en place et que des dégradations se répètent en raison d'une sécurité inadéquate, d'un manque d'entretien du local, ou de problèmes d'administration de la copropriété, la responsabilité du syndic peut être engagée. Cependant, de tels cas de négligence dans l'entretien des parties communes sont très rares. J'encourage les copropriétaires cyclistes victimes de dégradation sur leur bien à inciter la copropriété à installer des caméras de surveillance, c'est souvent la solution la plus simple. Ces images peuvent être transmises à la police, seule habilitée à les examiner et à mener l'enquête.
D’ailleurs chaque année, 400 000 vélos sont volés en France. Un espace de stationnement sécurisé en copropriété avec un système d'attache en trois points réduit considérablement le risque de vol. C'est donc, à mon sens, préférable à l'autorisation de stationnement en parties communes en assemblée générale.
Sachant que le décret de juin 2022 est venu préciser exactement les types de points de sécurité et comment il faut pouvoir attacher son vélo ! D’une part pour ne pas présenter de risque pour le copropriétaire lui-même et ensuite pour s’assurer qu’il n’y ait pas de dégradation. C’est très rare d’avoir une telle précision dans un texte si ponctuel.
Tout cela va effectivement dans le bon sens ! Vous disiez tout à l’heure qu’un copropriétaire pouvait entamer un recours contre un copropriétaire cycliste dont le vélo gênerait les parties communes ou présenterait un caractère dangereux pour la copropriété.
Lorsque les copropriétaires constatent que des vélos sont présumés abandonnés, ont-ils la possibilité de le retirer et en faire don à une association ? Si oui quelles sont les étapes légales qu’ils doivent suivre ?
C'est en effet une question délicate qui touche à la notion de pouvoir disposer de quelque chose qui ne nous appartient pas. En réalité, la situation peut être parallélisée avec les voitures ventouses, ces véhicules abandonnés dans les parkings. Cependant, pour les voitures, il existe une réponse claire : la fourrière n'intervient pas dans les copropriétés pour les enlever.
En ce qui concerne les vélos, la situation est peut-être plus simple en raison de leur encombrement moindre, mais cela reste une question d'appartenance à un tiers.
Le vélo est intrinsèquement considéré comme un bien meuble. Dans les articles plus anciens du code civil, on stipule que, en l'absence de preuve de propriété, un bien meuble appartient à celui qui le détient. En d'autres termes, si je ne peux pas prouver que le vélo m'appartient et que je ne le revendique pas de manière explicite, il appartient à la personne qui le prend. Ainsi, lorsqu'un vélo se trouve dans un local commun de la copropriété, on pourrait presque être tenté de penser qu'il devient de facto la propriété du syndicat des copropriétaires. Il n’en demeure pas moins que ce vélo est présumé appartenir à quelqu’un donc afin d’éviter tout litige et avant d'entreprendre toute action, une assemblée générale est nécessaire. Au cours de cet échange il est possible de discuter du problème des encombrants, tels que les vélos abandonnés et de suggérer d’en faire don à une association.
Pour vérifier si les vélos sont abandonnés, il sera nécessaire de les faire marquer d'une manière ou d'une autre, que ce soit avec des colliers de serrage (serflex), des étiquettes ou du ruban adhésif. Par la suite, il est nécessaire d’informer l’ensemble des copropriétaires que passé un certain délai à définir, tous les vélos encore “marqués” seront remis à une association. Ce processus a été mis en œuvre avec succès à plusieurs reprises.
Même si quelqu'un se manifeste par la suite pour réclamer le vélo, vous aurez la preuve que vous avez alerté tous les copropriétaires et que vous leur avez laissé un délai suffisant pour réagir.
Si une information complète est partagée avec tous les copropriétaires, et si l'assemblée générale approuve la démarche, alors il est possible de couper les antivols. La seule exception concerne les vélos situés dans une partie privée, telle qu'un balcon ou un jardin à jouissance privative, où l'on n'a pas le droit d'intervenir. En revanche, si le vélo est dans une partie commune, la procédure précédemment décrite peut être suivie.
Merci pour cette explication et cette astuce. Ce que je conseille toujours au moment de rénover le local à vélo, puisque j'interviens à ce moment-là, c'est de tout simplement mettre sur tous les vélos le numéro de téléphone de son propriétaire pour éviter ce genre de tracas.
En effet, une approche alternative serait de procéder à la création d'un règlement intérieur pour le local à vélo lors de sa mise en place, en le soumettant au vote de l'assemblée générale. Ce règlement peut être approuvé à une majorité simple. En conséquence, le règlement pourrait exiger que les vélos soient identifiés à l'aide d'un autocollant comportant le numéro de téléphone du propriétaire. Cette mesure contribuerait à résoudre le problème des vélos abandonnés, car leurs propriétaires seraient plus facilement joignables.
C'est un excellent point. D’ailleurs de toute façon lors du réaménagement d’un espace de stationnement vélo, les entreprises chargées de ces travaux ont besoin que l' espace soit vide pour intervenir, d'où l'importance d'utiliser ces méthodes pour éliminer les vélos inutilisés et ainsi faciliter le désencombrement avant le début des travaux.
Pour terminer je souhaite insister sur le fait que la question du local à vélo est souvent négligée par les syndics en raison de leurs multiples obligations et d'un ordre du jour souvent chargé lors des assemblées générales. Cependant, depuis le 1er janvier 2017, il est obligatoire d'aborder cette question et de décider si la copropriété réalisera les travaux pour créer un espace de stationnement pour les vélos. Il est essentiel de rappeler cette obligation au syndic et de demander son inscription à l'ordre du jour. Un courrier recommandé à ce sujet peut être envoyé.
Si le syndic ne réagit pas efficacement, il ne faut pas hésiter à consulter de sa propre initiative des entreprises spécialisées comme Clap vélo pour obtenir des plans et au moins deux devis. Ces éléments peuvent être présentés pour inscrire le sujet à l'ordre du jour de l'assemblée générale. Il est crucial de ne pas attendre que le syndic agisse de manière proactive, car d'autres questions comme les rénovations énergétiques peuvent prendre le dessus et reléguer le sujet du vélo au second plan.
Tout à fait ! Personnellement je suis conseillère à mon compte en aménagement de parking vélo donc j'interviens dans les copropriétés pour relever les dimensions, toutes les contraintes techniques et ensuite dessiner les plans et faire une estimation. L’idée est que les copropriétaires puissent disposer d’un mini cahier des charges qu’ils transmettent à des fournisseurs pour obtenir des devis.
Mes services sont gratuits et si la copropriété va au bout du projet elle peut récupérer jusqu'à 50 % de cofinancement grâce à des subventions CEE qui sont pilotées par la Fédération des usagers de la bicyclette.
Je dis cela car il serait dommage de reléguer le vélo au second plan alors même qu’il existe de nombreuses aides pour créer des parking vélo.
C'est un conseil avisé. Dans un contexte où les copropriétés sont submergées par une multitude de nouvelles obligations liées à la transition énergétique et à d'autres domaines, présenter un projet en mettant en avant les aides disponibles est une approche judicieuse. Les copropriétaires sont souvent préoccupés par les coûts liés à la rénovation de la toiture, à l'isolation de la façade et autres dépenses majeures.
En mettant en avant le fait que le projet d'aménagement pour les vélos peut bénéficier de subventions, vous suscitez un intérêt plus fort et montrez que cette initiative peut être réalisée de manière économique. Présenter la question du stationnement des vélos sous cet angle incitatif peut augmenter considérablement les chances d'approbation en assemblée générale, en soulignant les avantages financiers et les opportunités de cofinancement.
Je souhaite rajouter que la réduction de la consommation énergétique des bâtiments est devenue une préoccupation majeure, car elle représente en France entre 20 et 30 % des émissions de gaz à effet de serre. Ces questions sont essentielles et ont été négligées pendant trop longtemps.
Il est intéressant de noter qu’à présent, quel que soit le texte de loi que l'on examine, les véhicules électriques et les vélos font systématiquement leur apparition, car nous sommes conscients de la nécessité de passer à une approche plus respectueuse de l'environnement. C'est un sujet important à discuter, que ce soit dans des entretiens comme celui-ci ou dans d'autres contextes, car il est en constante évolution et a un impact significatif sur notre environnement et notre mode de vie.
Pour vous adresser au cabinet de Maitre Naudin vous pouvez contacter le standard téléphonique au 04 91 55 02 12 ou par email sur contact@cabinetnaudin.com
Pour toute question concernant l’aménagement de votre parking vélo, vous pouvez me contacter en cliquant sur “je connais désormais les obligations et aides pour la création de parking vélo et je souhaite me faire accompagner par Clap vélo”